L’Algérie participe aux Jeux Olympiques de Londres et on
entendra souvent scander « One, two, three ; viva l’Algérie »,
en indo-germano-latin, pour soutenir nos sportifs ainsi que pour confirmer que
notre analphabétisme est bel et bien trilingue, même après l’université.
Sur la cérémonie d’ouverture, que je n’ai pas eu le loisir
de suivre, des Algériens ont critiqué le fait que les sportifs algériens
portent des survêtements alors que ceux des autres pays portent plutôt des
tenues traditionnelles. Peut-être est-ce pour leur donner l’occasion de les
porter le plus longtemps possible, entre l’aller et le prompt retour. Puis, le
survêtement est l’habit algérien par excellence : on travaille avec, on
sort avec, on dort avec et on va même à la mosquée avec. Pas mal, non ?
Au fait, une tenue traditionnelle unifiée pour nos sportifs,
ce serait quoi ? Kabyle, staifie, constantinoise, algéroise, tlemcenienne,
saharienne, chaouie, targuie ? Cette question nous rappelle le malaise du
multiculturalisme que nous tentons de dissiper pas des décrets au lieu de le
faire par la tolérance, la rencontre et le débat. Ladite tenue unifiée pourrait
tout simplement être choisie à tour de rôle pour les différentes rencontres
sportives ou, pourquoi pas, par tirage au sort.
Je ne sais pas si c’est à cause de la défection de leurs
voleuses ou au jeûne qu’elles doivent leur défaite.
A propos, doit-on jeûner ou non pour participer efficacement
aux Jeux Olympiques ? La question est compliquée et pas seulement pour des
raisons religieuses. Là où ça coince, c’est que le ramadan est toujours
prétexte à la fainéantise et à la procrastination pour les Algériens. Comme si
ça nous épargnait le reste de l’année, dira-t-on.
Je serais tenté de demander à nos muftis fonctionnaires d’autoriser,
que dis-je, d’obliger certains à ne pas jeûner, vu que leur jeûne est plus
nocif que bénéfique. Après tout, ces muftis fonctionnaires ont bien émis une
fatwa selon laquelle seraient hypocrites tous ceux qui boycotteraient les
élections législatives algériennes du 10 mai dernier.
En considération de tout
cela, ce qui me semble être une hypocrisie c’est de ne dire à ces sportifs ni
oui ni non. On ferme l’œil pour ne pas outrer les décideurs. C’est la preuve
que le religieux est au service du politique, comme il l’a presque toujours été.
Ça ne pourrait pas être l’inverse, sinon ce serait la laïcité. Or, nous la rejetons,
cette impiété, et nous nous complaisons dans nos contradictions. Et qu’importe
si nous tenons la canne par le milieu, nous sommes les meilleurs ! One,
two, three, etc.
Le comble c’est que
les Algériens n’ont pas le droit de ne pas jeûner chez eux alors qu'ils en ont le
droit à Londres, pour rapporter des médailles qu’ils ne rapporteront probablement
pas. Du moins pour la plupart d’entre eux. En tout cas, si médaille il y aura,
j’espère qu’elle aura été acquise sur le podium et non pas dans le vestiaire
d’un distrait médaillé.
Et si c’était simplement une question de niveau
athlétique ? Si l’Algérie veut affirmer sa position dans le monde grâce au
sport, il est grand temps qu’elle y investisse. Or, le populisme de nos
dirigeants fait en sorte que ce sont les disciplines sportives qui rapportent
le moins de médailles qui sont les plus dotées en moyens.
Un autre « incident » a été causé par la rumeur
selon laquelle trois de nos boxeurs participant aux JO de Londres auraient volé
des vélos.
Nos officiels ont clairement démenti mais le doute persistera toujours et l’on ne saura jamais si aucun d’eux
n’était mal intentionné.
Soyons sérieux un instant. Un boxeur algérien ne se serait jamais
imaginé rentrer au pays un vélo sous le bras. Un vélo c’est plus rapide et
moins dangereux qu’un radeau mais quand même. Ou alors, pour rejoindre une
dulcinée ne résidant pas à Londres. Pour prendre le tunnel sous la Manche,
tiens. En dégonflant les pneus pour qu’ils suivent le rail salvateur et en
s’enveloppant d’un drapeau algérien d’au moins trois mètres de long. Comme ça,
s’il était arrêté, il pourrait dire qu’il est venu fêter la victoire de
François Hollande aux élections présidentielles françaises.
-
Vous arrivez un peu tard, Monsieur. La Bastille a déjà été reprise
d’assaut et la fête est finie. Lui aurait dit un policier à la frontière.
-
Ce n’est pas grave Monsieur l’agent.
Après le printemps arabe qui donne des ailes, c’est l’été français et Paris
Plage ne saurait être une réussite sans le tintamarre et avec trop de vélib’.
-
Ben vous alors, vous êtes gonflé !
(ndla : Il n'aurait pas parlé des pneus).
Et qu’aurait-il fait s’il avait été rattrapé par un
train ? Il l’aurait traité de raciste ? Il se serait intégralement
voilé pour devenir victime ?
Bon, je m’arrête sinon on dira que je vois le verre à moitié
vide, c'est-à-dire que je préfère la pécheresse lie à la lucrative mousse
« halalisée », et que je me trompe sur les aspirations de nos jeunes,
avec ou sans accent.
Si ce vol de vélos s’était avéré être vrai, c’aurait été difficile
de demander de l’aide aux Tunisiens, après la scène du film où l’Inspecteur
Tahar et son Apprenti volèrent deux vélos à des agriculteurs tunisiens. Cette
scène, montrant la kleptomanie algérienne qui devient licite par la prétention de
supériorité sur leurs voisins,
était censée guérir les Algériens de leurs mauxen les faisant en rire. Il est triste de constater que tout le talent de
l’Inspecteur n’y aura pas suffi.
Je ne peux pas oublier de rappeler que nos autres sportifs
sont honnêtes. Il y a juste qu’ils passent inaperçus, eux, et j’imagine leur souffrance
dans l’amalgame. Un amalgame qui fait oublier qu’il existe des Algériens qui
sont des modèles de citoyenneté et de civisme mais qui sont basanés avec ou
sans bronzage. Méritent-ils ce qui leur arrive parce qu’ils se taisent et ne se
démarquent pas ? Possible.
Une chose est sûre, ce sont nos comportements à nous tous
qui nous rapporteront les meilleures médailles, celles de la bonne réputation
qu’il sera bon de gagner et meilleur de mériter. Si personne ne volait en se
fichant d’augmenter le contrôle au faciès de ses compatriotes, il ne subirait
pas lui-même ces contrôles car ses compatriotes auront pensé à lui.
Cela ne redore en aucune façon le blason factice de certains
de nos dirigeants, cela doit juste nous faire penser que, finalement, le système
que nous haïssons c’est nous.