Le ministère de la Défense vient de communiquer, après que Mohamed
Mechati ait appelé l’armée à intervenir. Mechati est l’un des derniers en vie
du groupe des 22, qui avait décidé de déclencher la révolution de 1954. L’armée
ne destituera pas le président de la République. Tant
mieux. Le président de l’Apn (Assemblée), lui, estime qu’il n’y a pas de
justificatif valable pour appliquer l’article 88 de la Constitution et que
la rue ne le réclame pas. Curieux que l’Assemblée dise être à l’écoute de la
rue alors que, d’habitude, elle lui fait la sourde oreille. Les paraboles
orientées vers Paris doivent faire mieux ouïr. De toute façon, la rue attend le
retour de Bouteflika à ses fonctions mais n’y croit pas vraiment. Les images
que la télévision algérienne en a diffusées hier, depuis l’hôpital des
Invalides, ont montré un président très affaibli, qui bougeait peu les lèvres
et pas du tout le bras gauche. Il est difficile de croire qu’il a réellement examiné
les dossiers en cours.
Les institutions civiles gagnent du temps, tergiversent ou
attendent de voir dans quelle direction va tourner le vent. La solution n’est
pas dans la tergiversation ou dans un bulletin de santé présidentielle, plus
clair que celui qui a été publié. D’ailleurs, les médecins réécriraient ce
bulletin aussi illisiblement qu’ils rédigent leurs ordonnances. Dans la rue, on
ressort qu’Abdelkader Bensalah, président du Cn (Conseil de la nation, dit sénat)
ne pourrait pas être intérimaire du président de la République. Pour
cause, la loi exige que le chef de l’Etat soit Algérien de naissance, alors que
Bensalah (né en 1941) ne serait devenu Algérien qu’en 1965.
Bensalah est énigmatique, par sa biographie strictement professionnelle
en dépit des doutes. Toutefois, il est invraisemblable qu’il ait tu sa supposée
origine marocaine et que Bouteflika l’ait laissé présider le Cn. Comme si Bouteflika
voulait devenir indispensable jusqu’après son départ. Indispensable, la rue
semble dire qu’il l’est, en scrutant l’horizon. Et les autres, pourquoi
n’auraient-ils rien dit ? Enfin, si c’était vraiment le cas, Bensalah
pourrait démissionner de la présidence du Cn, au profit d’un Algérien de
naissance qui assurerait l’intérim à la tête de l’Etat. Quoi qu’on dise ou
spécule, les élections présidentielles anticipées sont la solution.
Ironiquement, Bensalah serait né Marocain près de Tlemcen, alors
que Bouteflika est né Algérien près de Oujda. L’incertitude des frontières aurait
alors compliqué l’imbroglio. En tout cas, au lieu d’inspirer la souhaitable paix
entre les deux pays, la proximité historique de Bouteflika avec le Maroc aura fait
jouir ou souffrir de monarchie multi-quinquennale. Sans couronne et sans prix
Nobel de la paix, on aura intronisé le président de la République avec des
burnous régionaux et autant de courbettes. Sans sujets pas de roi, sans roi pas
de cour. Libre à chacun de faire le baisemain là où il veut. Au-dessus de rue
et cour, le ciel est plus beau.
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