vendredi 17 mai 2013

La 2ème République algérienne aux huiles conventionnelles


Un rapport vient d’être publié par l’Agence Internationalede l’Energie (AIE), estimant que le boom des huiles non conventionnelles nord-américaines va provoquer une onde de choc sur les marchés. Grâce au pétrole de schiste, les Etats-Unis deviendraient le premier producteur de pétrole en 2017. Cela veut dire qu’il y aurait une hausse de l’offre et que les recettes algériennes diminueraient. Certes, l’AIE a tendance à pronostiquer au détriment de l’Opep. N’empêche qu’en 2012, alors que l’Algérie ne dépensait pas autant pour sécuriser ses frontières, la Banque d’Algérie avait évalué autour de 110 dollars le seuil critique du baril. Les cours actuels n’en sont pas loin et le risque est bien réel. A chacun d’en imaginer les conséquences économiques et sociales. La plus grande indépendance énergétique des Etats-Unis ne veut pas dire qu’il y aura moins de conflits dans le monde, comme le laisserait penser ce que l’on sait de leur interventionnisme. Avec ou sans eux, il y en aura notamment pour l’eau potable et la terre arable, ou suite à des tensions interethniques. L’Algérie connaît la sécheresse et son brassage ne la rend pas monoethnique.

Une puissance ne peut pas être pacifiste, puisque c’est par l’hégémonie qu’elle a acquis sa puissance. Une puissance qui sert à plus faible, du reste. En 1512, des Algériens, n’ayant pas encore ce gentilé, ont appelé les Ottomans pour expulser les Espagnols occupant Bougie. En 1990, le Koweït a appelé les Etats-Unis pour expulser l’envahisseur Irakien, en l’absence d’armée arabe de taille. J’avais compris ses arguments et condamné son invasion et celle de l’Irak. Condamné sans plus d’effet, au point de me demander s’il est niais ou inconscient d’espérer que les puissances cessent de faire le gendarme du monde.

Prêt à tout pour se maintenir, l’actuel gouvernement algérien vide les caisses de l’Etat en augmentant les salaires des râleurs qui occupent la rue et les Assemblées. Dans cette entreprise, il est aidé par des gouvernés qui, en bâclant ce qu’ils font, nous attribuent le label « travail arabe » à l’effet d’agence de notation financière. Les Algériens savent leur qualité de production. Ils disent qu’une marchandise est importée dès qu’ils doivent justifier sa cherté. Ce n’est pas une simple question de taux de change de monnaies, ils précisent aussi que leur appartement a été bâti par des étrangers, aux coûts locaux de main d’œuvre, lorsqu’ils veulent le vendre plus cher. Il manque aux Algériens un esprit de constitution, de charte de citoyenneté. Il y a bien la Déclaration du 1er Novembre 1954 mais, étant la seule que personne ne remet en cause, elle a été trop manipulée. De fait, son esprit a été spolié en 1962, monopolisé en 1965, voilé en 1989, ensanglanté en 1991. Plus personne n’en parle aujourd’hui.

Je ne suis pas contre la deuxième République algérienne. Ce que je n’aime pas dans celle à laquelle on appelle, c’est qu’elle ne retient pas de la première la leçon de l’autruche. Elle n’explique pas comment elle traite le communautarisme et la contradiction apparente ou réelle entre la démocratie et la charia, par exemple. Pourtant, ces questions seront disséminées dans le prochain débat et elles seront opportunes au regard des revendications post-linguistiques et du retour à la charge des islamistes. Le simplisme qui se dégage de cet appel indique un certain suivisme, aussi. La France, pour la nommer, est l’un des exemples dont on pourrait s’inspirer. Cependant, il serait absurde de copier tel quel son modèle qui peine à faire cohabiter chez lui les races et les religions. La France rediscute en ce moment la possibilité de supprimer le mot « race » de sa Constitution. Ce mot n’existe pas dans la nôtre, tant mieux, mais il existe dans notre inconscient. Je ne crois pas que l’ignorer soit une bonne idée pour évacuer le malaise ressenti en parlant de notre identité.

Puis, peu de propositions accompagnent cette deuxième République et elles ont un goût de réchauffé. Un des problèmes sera de trouver des figures nouvelles, capables de redonner espoir. Dans la course qui a commencé, Ali Benflis, ancien ministre et premier ministre, annonce qu’il ne sera candidat à la présidence que si Bouteflika ne se représente pas. Une manière de dire que Bouteflika ne l’a pas battu en 2004 mais qu’il l’a éliminé. A croire que Bouteflika est le régime à lui tout seul. Aucun discours ne sera anti-démagogique s’il laisse en place les actuels corrupteurs, criards ou grands muets. Or, aucun politicien n’écartera ces corrupteurs sans le soutien de la seule force en mesure de les convaincre, c’est-à-dire du peuple. Le vrai, pas celui des décomptes électoraux. Un cercle vicieux qui montre que le renouveau de la République n’est pas une histoire de numéral ordinal.

Le rapport Global Trends 2030, qui établit des scénarios géostratégiques pour l’horizon indiqué, nous dit ce que nous savons déjà, que nous allons dans un mur matelassé de slogans de pouvoir et d’opposition. En publiant ce rapport, le National Intelligence Council dit aussi que nous ne lirons pas ou que nous ne changerons pas. Affligeant. Avec mes faibles moyens, je continue à indiquer des pistes et à réfléchir sur ce que pourrait être l’Algérie du rêve et du réalisme. J’appelle les intellectuels à oser les tabous de leur raison et les autres à ne pas se contenter de la vindicte. Faute de quoi, les radeaux et les canots de sauvetage ne suffiront pas.

Hichem Achi

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