lundi 6 mai 2013

Sur le conflit syrien


Si le conflit syrien prend autant d’ampleur médiatique c’est en raison de l’appréhension de sa suite, en observant le bourgeonnement voilé du Printemps arabe, en Tunisie, en Egypte et en Libye. Du côté des populations arabes, c’est la peur que s’installe un régime intégriste, en seconde position après celle de la montée d’Israël dans le Proche-Orient.

Certes, Bachar el-Assad est préférable aux islamistes, dans la considération du devenir de certaines libertés individuelles dans son pays. Comme lui, les dirigeants arabes qui ont été confrontés à de telles situations ont affirmé être des remparts contre l’islamisme, l’impérialisme et le sionisme. Sur ce dernier, d’abord, peu d’Israéliens croient encore au Grand Israël. Puis, si el-Assad pouvait s’opposer à Israël, il aurait récupéré le Golan que la communauté internationale a reconnu à la Syrie. Le monde a toujours été régi par des rapports de forces et la souveraineté des Etats-nations est une chimère dans sa perception. La Syrie n’y échappe pas et si elle est en mauvais termes avec Israël et les Etats-Unis, elle est assez proche de la Russie et de la Chine qui ne la soutiennent pas par philanthropie.

Quant au Qatar qu’on traite de tous les noms et dont on dénonce les OPA, en France et ailleurs, ses arguments méritent d’être écoutés. Bien qu’il dispose d’une industrie touristique et halieutique, la concentration de son économie autour des hydrocarbures, la rareté de ses terres arables et ses litiges frontaliers avec l’Arabie Saoudite l’ont poussé à se diversifier économiquement. Pour ce faire, il a fondé le Qatar Investment Authority, en 2005, chargé notamment d’investir hors du territoire.

Deuxièmement, sa chaîne télévisée Al Jazeera qui ne serait pas neutre, spécialement dans sa couverture du Printemps arabe. Pour rappel, cette chaîne a été créée en 1996 pour être le porte-voix du rayonnement économique et stratégique du Qatar. Dans leur inconscient, les populations arabes ont cru qu’elle était objective, parce qu’elle pensait comme eux ou vice-versa. Dans leur naïveté, ils ont cru que des médias totalement neutres pouvaient exister. Aussi objectif qu’il soit, le simple avis d’un journaliste ou d’un rédacteur est souvent un parti pris.

Troisièmement, on lui reproche ses bons rapports avec Israël que les pays de la Ligue arabe se cachent à peine de fréquenter. Ils viennent de faire un pas dans le sens de la normalisation des relations avec cet Etat, en échange d’une application partielle de la résolution 194 de l’Assemblée générale des Nations Unies alors qu’ils avaient toujours rejeté le plan de partage. Autrement dit, après 65 ans et plusieurs guerres, les pays arabes reconnaissent un tout petit peu plus Israël. On ne les fustige ni pour la reconnaissance ni pour le retard.

Avec ou sans leur Ligue qui engage des pourparlers de limace avec l’Etat hébreu, les pays arabes auraient pu faire pression sur la Syrie pour qu’elle engage de vraies réformes et que le changement se fasse sans cette violence. Or, ces pays ne sont pas assez audibles ou crédibles pour concurrencer les puissances sur le terrain. D’ailleurs, si l’un d’eux devenait puissant, aurait-il le même regard et la même position sur tel conflit ? Pas sûr. Comme en Syrie, leurs régimes implosent. Ils sont occupés à se relooker ou à s’entre-déchirer pour la survie, les récentes révélations de scandales économiques dans la presse algérienne en sont une manifestation. Pendant ce temps, beaucoup d’Arabes ressortent les photos de Nasser, partagent du bruit et des slogans sur les réseaux sociaux, et pensent que Bernard-Henri Lévy a persuadé l’Occident de prendre militairement part à leur Printemps. Pauvres de nous.

1 commentaire:

  1. "les pays arabes auraient pu faire pression sur la Syrie pour qu’elle engage de vraies réformes et que le changement se fasse sans cette violence. " Cette option réaliste n'a été encouragée que par l'Algérie, la Jordanie et la Mauritanie mais à demi mot. Les autres ne lui ont jamais pardonné sans alliance avec "l'axe du mal" que Buch avait identifié dès l'attaque des deux tours. L’Algérie n'a pas choisi cette voie par peur de l’illusion "du printemps arabe" mais appréhendait un immense complot dont elle même est dans la mire du plan Qatari et Arabie Saoudite. Si on observe le changement dans notre région, l'encerclement se fait de jours en jours : la Libye, la Tunisie sont vert et favorable, le belliqueux Maroc aussi, la fragile Mauritanie ne tarde pas à tomber, reste le Niger et le Mali que la France hégémonique avait temporellement immunisé. Des états arabe islamistes inféodés au Qatar fait la bonne affaire de l'occident. Ce sont les véritables alliés qui font rempart à la montée démocratique dans les pays que l'occident n'aime pas pour des évidences stratégiques: maintenir le monde arabe dans la tourmente, ne pas se développer, ne pas se stabiliser et demeurer un marché ( souk ) juteux pour écouler leur camelot.

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