lundi 3 juin 2013

Pour délester il faut lâcher du lest


A quoi font penser les enquêtes de l’Algérie sur la corruption et ses annonces de réformes intérieures ? Réponse : A un régime de système qui s’agite pour sa survie.

Des soucis sécuritaires, à la plupart de nos frontières terrestres, accompagnent cette agitation. Il serait impensable que l’Algérie reste inerte alors que d'autres, dont le Maroc, courtisent l’Afrique. La récente annulation, par l’Algérie, de 902 millions de dollars de dettes africaines rentre dans ce cadre, et ce n’est pas la première fois. A quelle proportion ces aides bénéficieront-elles aux peuples des pays concernés ? Là est la question des aides. Idéalement, l’Afrique rapatrierait les 1000 milliards de dollars qui auraient été illicitement transférés et déposés dans des banques européennes. Si j’étais gouverneur de la Banque centrale européenne, je ferais en sorte de priver les dépositaires de cet argent et je leur remettrais, à la place, la pièce de 1000 milliards de dollars de Barack Obama. Là, elle n’occasionnerait aucun dégât, au contraire. Toujours sur l’Afrique, je pense au Sahel où les QG terroristes sont introuvables par drones et satellites. Je me demande où se trouve leur argent, sur lequel leurs demandes de rançons donnent une idée. Ils doivent avoir inventé la banque ambulante et la parade à la lutte contre les paradis fiscaux. Pour l’Algérie, la tension est aux quatre coins cardinaux.

En parlant de cardinaux, j’en imagine ici plus d’un, de Riche-lieu, qui usent de rouerie. Comme sur un navire volant dont une pièce Du-mât pair serait cassée mais jouable. Pour gagner, le mousse-que-terre, qui n’est pas nécessairement gentil-homme, doit réaliser un décor printanier, distraire le public, distribuer gratuitement quelques amuse-gueules et estoquer quelques compagnons. Je me réveille et je constate que le système ne garantit pas la fixité du poste et qu’il arrive que l’immunité soit lâchée avec du lest.

En dehors de cela, le front d’agitation s’étire du Sud au Nord et le voyage continue pour ceux qui se sont fait la valise avec notre argent comme pour les enquêteurs. Air Algérie y participe sûrement, en attendant qu’elle quitte le palmarès des vingt plus mauvaises compagnies aériennes au monde ou que son personnel arrête de calculer son salaire en euros. Le prétexte serait que la responsabilité est grande concernant la vie des passagers. Mourir en altitude serait moins dangereux que mourir dans un hôpital délabré, alors. En tout cas, c’est moins douloureux et moins long que de mourir de désespoir, appuyé contre un mur.

A l’intérieur du pays et après les entreprises publiques, les services de sécurité s’intéressent aux walis. Je ne m’arrête pas à la volonté affichée de combattre la corruption, c’est une pilule à la posologie qui préserve sa tête à notre ténia. On veut nous faire croire que les irrégularités dans l’attribution du logement social préoccupent en haut lieu. C'est-à-dire que ça va changer. On se doute bien que seuls des noms changeront et qu’il ne sera pas distribué plus équitablement qu’avant. Le plus important c’est que les gens y croient. Or, ils n’y croient pas et, là, il y a matière à s’étonner. Les Algériens n’y croient pas mais assistent silencieusement au simulacre. Alors, soit ils sont morts, avant ou après la décennie noire, soit ils s’accommodent des règles actuelles de distribution. Ils seraient donc eux-mêmes le système. A propos, on revend les pas-de-porte des logements sociaux, en Algérie. Ceci pour dire que tout s’y vend et pour donner une idée de comment on y conserve le patrimoine immobilier public. Le fait reproché au wali d’Oran, d’avoir fait passer Djamel Debbouze par le salon d’honneur de l’aéroport alors qu’il n’y ouvrirait pas droit, est un prétexte, on l’aura compris. Puis, les wilayas ne sont pas les seules collectivités où il y aurait de l’abus. Pour les collectivités locales, il faudrait une brigade spécialement formée, outillée, indépendante et résistante à la pression. Une gageure, donc. Le seul moyen qu’aurait cette brigade d’éviter les écueils c’est d’être transparente. Pas comme cette « police parallèle » dont on n’a entendu parler qu’une fois dissoute, ces derniers jours, et dont l’opacité ne semble pas inquiéter les représentants du peuple. Il est su que, quelle que soit la force d’un régime, le peuple lui fait toujours peur. Seulement, est-ce du peuple que le régime a le plus peur ?

Le va-et-vient entre le Nord et le Sud laisse également le temps au gouvernement de dire que les hydrocarbures nord-américains ne nous déclasserons pas. Ça me rappelle la mosquée Emir Abdelkader (Constantine) qui devait être la plus grande d’Afrique et qui avait été déclassée par la mosquée Hassan II (Casablanca), entamée après la nôtre et achevée avant. L’Algérie ne désarme pas pour autant. La prochaine plus grande mosquée d’Afrique est programmée à Alger au coût de plus de 1,3 milliards de dollars. Elle sera peut-être battue à plate couture mais qu’importe, un autre mégaprojet démesuré permettra de détourner les regards et les deniers. Pour le moment, nos législateurs pensent à réviser des articles de la Constitution et s’arrêtent de compter au 87, pendant que des Algériens guettent Bouteflika avec anathèmes ou lauriers. D’autres souhaitent de la chance aux 555 694 candidats au baccalauréat 2013, les encourageant, sans s’en rendre compte, à se leurrer de diplômes et à chômer.

Je ne veux pas de Printemps arabe parce qu’il remplacerait des corrompus par des affamés. Je crois à la vigilance et à la critique. Je m’adresse à la conscience qui sommeille en ceux que la cupidité aveugle, en sachant qu’il y a de l’humain dans le carriérisme et que la raréfaction de la probité justifie le pragmatisme. Je continue à jeter mon grain de sel pour que le grincement de l’engrenage donne envie d’améliorer et de réparer.


Hichem Achi

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