vendredi 13 mai 2011

Otages depuis 500 jours




Cela fait 500 jours que Hervé Ghesquière, Stéphane Taponier et leurs trois accompagnateurs sont retenus en otages en Afghanistan. Un pays musulman où certains défigurent leurs filles au vitriol ou leur coupent le nez parce qu’elles veulent étudier. Drôle d’interprétation de la citation de Mahomet (qsssl) qui a recommandé de prendre soin des femmes lors de son dernier prêche. Malgré le double tranchant de la surmédiatisation, le rappel inlassable de la détention, à toutes les éditions des JT de France Télévisions, fait tirer chapeau bas à ces confrères plus que solidaires. Ces 2 journalistes + 3 ne sont pas les seuls à être dans cette situation. D’autres sont détenus par Al-Qaida au Maghreb Islamique (AQMI) ou ont tout simplement été oubliés.

Reporters Sans Frontières en parlait bien. Une ONG qui se faisait un peu rare avant que Robert Ménard ne la rappelle à notre mémoire par sa récente série d’interventions médiatiques. Je le soutiens totalement lorsqu’il se bat pour la liberté d’expression pour tous, y compris pour l’extrême droite partisane. Le problème c’est que, sous prétexte de dire que ces politiciens de l’extrême sont devenus moins antipathiques, il en arrive à adhérer à pas mal de leurs propositions. L’expérimenté journaliste qu’il est n’arrivera pas à faire croire qu’il a été dupé par le relookage et le discours un chouia plus diplomate. Ce n’est pas encore la déchéance totale vers laquelle l’attire Dieudonné ni celle dans laquelle le plonge Edwy Plenel mais la chute est imminente. Il devrait méditer les propos de Valérie Pécresse : « L’emballage a changé mais le produit est toujours aussi toxique ».

L’AQMI fait parler d’elle. Pendant qu’on en parle, elle passe à autre chose : se diversifier pour plus de lucre qu’elle va chercher de plus en plus loin dans le subsaharien. L’acronyme AQMI serait-il la francisation de Hike me ? En tout cas, mollah qui roule amasse mousse. Le domaine vaut le coup qu’on s’y spécialise car tout porte à croire que la fin n’est pas pour demain, surtout après la mort de Ben Laden. Cependant, il y a analyse et analyse et les plus vus ne sont pas forcément les plus convaincants. Je ne peux pas penser qu’un Mohamed Sifaoui puisse avoir une vision claire quand j’écoute l’acharnement qu’il déploie pour saborder toute tentative de dissiper le smog officiel qui flotte encore au dessus des attentas du 11 septembre 2001. Le fait que ces attentats soient une abjection ne diminue en rien la lancinance des questions qui restent en suspens.

Je ne dis pas qu’aucun terroriste islamiste n’y a participé. Je dis que les zones d’ombre qui restent à éclairer sont tellement évidentes qu’on ne peut pas croire que les Américains ne cachent rien. L’une de ces zones d’ombre est dans le fait que Ben Laden n’ait jamais revendiqué ces attentats alors qu’il en avait revendiqué d’autres. Pourquoi ce serait-il privé d’ajouter ces « succès » de taille à son palmarès ?

Je ne suis pas superstitieux et ce vendredi 13 ne m’empêchera pas d’espérer que les otages seront bientôt libérés et que la leçon servira. Personne n’a le droit d’empêcher un journaliste d’informer et si l’information est aussi précieuse lorsqu’elle est recherchée en milieu hostile c’est que ceux qui la pistent devraient être mieux protégés.

Se pose la question de savoir quel avenir pour les reporters quand on sait que, durant la dernière élection présidentielle en Iran et le printemps arabe, des internautes ont été assez bons dans le genre. On dira qu’un reporter est plus qu’un fonctionnaire qui rapporte des informations. Oui, mais l’analyse de l’information peut toujours se faire à distance. Deux problèmes resteront quand même à résoudre : la véracité de l’information qui est transmise depuis le terrain et le déficit en émotion qui se lira entre les lignes de ladite analyse journalistique et qui sera dû à la froideur de l’éloignement.

Se pose aussi la question de savoir quand l’Algérie et le Maroc se réconcilieront pour pouvoir mieux collaborer dans la lutte contre le terrorisme international. Les achoppements ne sont pas seulement sur la question du Sahara Occidental et sur l’appellation Union du Maghreb Arabe qui ne fait pas de place à l’amazighité. Ce ne sont pas les obstacles les plus importants.

Je regarde l’Union Européenne. Vingt-sept pays et une trentaine de langues officielles n’ont pas été des handicaps pour une union qui est plutôt considérée comme un succès politique. Je me retourne vers le Maghreb et je vois que des éléments communs comme l’Histoire, la langue officielle et la religion majoritaire, n’ont pas réussi à nous unir. Là, je me dis que le problème se situe ailleurs.

Le septentrional exemple d’union qui s’offre aux gouvernants maghrébins est doublement dissuasif. Au Nord, les gouvernants sont là pour une durée limitée à deux ou trois mandats, constitutionnellement ou traditionnellement. Puis, tout pays de l’UE fait des concessions à cette dernière, quitte à fournir un premier ou un deuxième bouc émissaire aux souverainistes. Ce n’est pas ce que veulent les homologues au Sud. Là où le moelleux du siège donne vite le tournis et devient addiction au qat régalien.

Pourtant, même au Nord, n’importe quel politicien serait tenté de durer. Dire le contraire serait non seulement un mensonge mais une aberration. Sinon, comment expliquer qu’un politicien ait un programme mais ne veuille pas être au pouvoir pour l’appliquer ? Ce qui fait la différence et détermine le type de démocratie, c’est la vigilance du peuple. Ici, il est difficile de parler de vigilance pour un peuple qui tue la poule pondeuse et s’étonne de ne plus avoir d’œufs.

Au vu de tout cela, l’UMA ne marchera jamais dans sa conception actuelle. Il n’y aura pas, non plus, d’unification des instances représentatives, du genre Président du Maghreb ou Ministre maghrébin des affaires étrangères. Il est possible qu’on assiste à des missions conjoncturelles qui affirmeront une position commune face à un problème donné et aux intérêts similaires mais ça retombera aussitôt après. Pour autant, il ne faut pas enterrer l’UMA. Il faut juste l’habiller de réalisme et la concentrer sur l’ensemble des accords et traités qui faciliteront les échanges et la coopération à tous niveaux.

Place à la culture. Elle qui fait peur. Ceux qui en ont peur ont raison d’avoir peur mais se trompent d’attitude. Mal intentionnée, elle peut faire des ravages. Bien intentionnée, elle ne peut faire que du bien même lorsqu’elle contredit celui qui la sollicite. Dans le cadre des échanges entres les pays de l’UMA, les semaines culturelles s’apparentent beaucoup à des séjours de relaxation pour ceux qui se sont épuisés à applaudir sans jamais contredire.

Je doute que ce discours trouve écho. Chaque gouvernement maghrébin continuera à mettre en pratique sa seule vision en faisant fi des critiques, et les désordres printaniers sont un alibi supplémentaire pour l’atermoiement. Seulement, qu’on arrête après cela de dire que ceux qui ne se sont pas révoltés trouvent plus verte la pelouse des voisins du Nord et qu’on arrête de les mettre en prison dès qu’ils tentent de la fouler.




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