mardi 19 juillet 2011

Gouverner Internet


La réunion initiée par Google Ideas think tank et tenue à Dublin, fin juin passé, a réuni des spécialistes des technologies de l'information et des terroristes repentis pour réfléchir à « comment éviter la radicalisation des jeunes ? Et comment ‘sauver’ ceux qui ont déjà basculé dans la violence ? ».

Au-delà des bonnes intentions affichées, celles de fluidifier la circulation de l’information et d’aider les jeunes à ne pas se radicaliser et tomber dans le terrorisme, les enjeux de cette bataille pour la e-gouvernance sont énormes. Il faut savoir qu’Internet ne restera pas limité aux ordinateurs et à l’actuel milliard de connectés dans le monde. Il touchera aux objets du quotidien.

Ainsi donc, il n’est pas du tout fantasmagorique de penser qu’on pourra savoir, depuis n’importe quel endroit au monde, ce que vous stockez dans votre réfrigérateur, qui vous appelez depuis votre téléphone portable ou les programmes que vous regardez sur votre téléviseur. Et si vous transportez un objet « marqué » électroniquement comme vous appartenant, on pourra même savoir où vous-vous trouvez, à n’importe quel moment. Effarant !

Les plus criminellement imaginatifs pourront même rêver de pouvoir faire tomber votre lave-linge en panne pour que vous en achetiez inutilement un neuf.

Le Département du Commerce états-unien, assure la supervision du DNS (Domain Name System), depuis sa création en 1983. Le DNS ayant été l’organe centralisateur des connections Internet pour la planète. Or, depuis plusieurs années, le monopole n’a cessé d’être remis en cause. Certes, l’administration états-unienne avait décidé, en 1998, de confier la gestion du DNS à une structure privée (ICANN) mais, dans les faits, aucun gouvernement n’a osé se séparer de cet avantage géostratégique et économique en le confiant à une quelconque structure non étatique. Parmi les acquis de ce combat, la possibilité, maintenant, d’avoir des noms de domaines en caractères autres que latins. En arabe ou en chinois, par exemple.

Parmi les initiatives pour penser la gestion d’Internet, et/ou sa gouvernance, une est conjoncturellement notable : le Sommet Mondial pour la Société de l’Information, organisé en 2005 en … Tunisie. Si Ben Ali avait su. Plus récemment, le G8 a tenu sa première rencontre autour de la e-gouvernance, à Deauville, en mai passé.

Parmi les organisations mondiales concernées, l’Internet Governance Forum, rattaché à l’ONU mais aussi l’OCDE. Clairement remise en question dans son existence même, par le postulat de l’e-gouvernance, cette Organisation, qui s’est réunie fin juin passé à Paris, a préfère rester neutre et prudente, en énonçant des principes rassembleurs comme la libre circulation de l’information sur Internet.

Les professionnels, eux, n’attendent pas les bonnes résolutions. Au 1er e-G8 Forum, des poids lourds du secteur avaient participé et s’étaient entretenus avec des chefs d’Etat et pas des moindres. En marge des rencontres officielles, Facebook et Google ont déjà commencé à croiser le fer pour acquérir ou garder la suprématie sur les réseaux sociaux Internet. Google a lance Google+ qui serait plus protecteur des données privées des adhérents. Facebook a riposté en lançant la vidéoconférence pour ses membres.

Les traditionnels supports de diffusion d’information, comme les quotidiens imprimés, sont obligés de penser leur actualisation et de la mettre en œuvre. On se rappelle des incidents aux bouches des métros français, où on distribuait des journaux gratuits pour pousser les lecteurs à ne plus acheter de papier et à lire sur Internet. S’ils s’y prennent à temps, les géants de l’information resteront dans la course. Des accidents de parcours comme le scandale des écoutes qui malmène en ce moment Rupert Murdoch (et même Scotland Yard et le gouvernement britannique) seront vite oubliés grâce à l’actionnariat et aux prête-noms journalistiques.

Dans ce tohu-bohu, paradoxalement silencieux sauf sur les claviers d’ordinateurs, quelle place pour des pays comme l’Algérie ?

Il ne serait pas intelligent de dire que ce n’est pas le moment et qu’il faut attendre l’annonce des réformes qui seraient en cours. L’occasion est bonne pour, au moins, étendre le réseau algérien de connections et pour améliorer ses performances. Pour ce faire, les dollars des réserves nationales pourraient très bien servir au lieu d’être distribués aux râleurs et autres grévistes sous forme d’irresponsables hausses de salaires.

Facteur essentiel de l’économie du futur, l’information n’attend pas. Il est possible pour l’Algérie d’en être, à condition qu’elle veuille réellement ne plus être un réservoir à pétrole qui, une fois à sec, dévoilerait la sécheresse de tout son environnement.

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